A l'Oie unique...
Le bar de l'Oie unique était situé dans le quartier Edith Cavell, à Uccle. A l'Oie unique, entre 18 et 20 heures, dans une ambiance géométrique, à la fois cosy et contemporaine, dans une belle bâtisse cossue, il était de bon ton de se montrer. Juste de se montrer. Auprès de qui? Et pour qui? Je l'ignore. Qui étaient tous ces habitués, attablés devant un cocktail ou une bouteille de vin? Des gens du coin? Des Ucclois branchés? Les jeunes et les étudiants -comme moi- ne devaient pas y être légion !
On buvait un jus de fruit, un café ou un apéro, il y avait sans doute une petite restauration, et après? On allait manger avec la fille -très belle, très mode- mais pas vraiment comme il faut, d'un grand avocat forestois; avec une réchappée de la Sainte, Immaculée Vierge de l'Enfant Fidèle, très distinguée et très jolie, mais aussi, très bête, dans le nouvel appartement d'un pâtissier réputé à Bruxelles. Ah! Ses fraisias, ses croissants feuilletés, ses choux au fromage, ses sorbets dans des coupes en biscuit et ses gâteaux d'anniversaire...
A l'Oie unique, qui trônait sur le zinc de ce bar pas trop crapuleux, et qui avait donné son nom à l'établissement, je ne suis jamais allée qu'une seule fois. Un soir d'hiver scolaire, au temps sacré de Berkendael, vers 17 ou 18 heures, sans doute en novembre, luminaires urbains, bancs du square humides, jonchés de feuilles mortes, bruits de la ville, atténués, trams 18 et 92, verres entrechoqués, et puis, le retour à la maison...